Athènes revit les affrontements entre la plèbe et les Eupatrides de la ploutocratie.
Comme Alcibiade, me voici en Sicile. L’Etna, siège de la forge du dieu Héphaïstos, ne manque pas de panache. Les îles Eoliennes non plus, qui partagent la même origine volcanique que les Cyclades et ma chère Santorin.
J’aimerais tant revoir… Les Corinthiens, qui fondèrent Syracuse, l’auraient baptisée Sirako, d’après les marécages qui l’environnaient. Son grand théâtre vit Platon, Pindare ou Euripide, l’inventeur de la tragédie moderne.
A propos de tragédie, en 1986, l’Australie avait frappé d’ostracisme l’agence Moody’s après avoir perdu sa notation AAA. Noté BB, le 10e Etat membre de la CEE, est entré dans la zone des investissements spéculatifs. Sa note correspond à une probabilité de l’ordre de 25% de faire défaut à trois ans, selon les critères de l’agence de notation. Une chance sur quatre de défaillance. Réciproquement, sept chances et demi sur dix que cela se passe bien, si on laisse le temps au temps.
Quel était le but du jeu des opérateurs financiers, connaissant l’incapacité politique de l’Union Européenne à piloter son système monétaire ? Forcer les Etats à injecter de nouvelles liquidités ?
L’euro, au plus bas depuis 14 mois, continue de chuter face au dollar et au yen. On se dit que, quand la monnaie unique dépassait 1,4 dollar, des opérateurs ont dû jouer la baisse.
Pour quel montant ?
Combien gagneront les spéculateurs à ce jeu dont les peuples et les Etats, même imprévoyants, même coupables de légèreté, même entrés au chausse-pied dans les fameux critères de convergence, sont les otages ?
Les taux s’envolent. Toujours plus haut. Olympiens voire olympiques, suralimentés par des rumeurs qui rappellent furieusement celles qui s’échappaient de la vieille Oreille de Denys, le tyran : Grèce à 2 ans : hier 13,817 % – aujourd’hui 14,906 %. Portugal à 2 ans : hier 4,552 % – aujourd’hui 5,509 %. Espagne à 2 ans : hier 2,191 % – aujourd’hui 2,61 %. Berlin évalue maintenant à 150 milliards les besoins d’Athènes. Insoutenable.
Les bourses plongent : -2,2% pour le CAC, -0,58% pour le Dow Jones, -3,27% pour le Nikkei, qui ajuste après des jours de congés, -0,88% pour le DAX, -2,93% pour l’IBEX 35.
Défendre la zone euro en danger, alors que la crise grecque menace de s’étendre au Portugal et à l’Espagne ou bien défendre les banques européennes, telle est la question. A la veille du sommet de l’Eurolande, Madame Merkel et Monsieur Sarkozy, chacun confronté à son opinion publique et à ses tropismes, ont écrit une lettre commune à Messieurs Van Rompuy et Boroso, afin, selon le Monde, « de refonder un socle commun minimal et demande l’approfondissement des règles de gouvernance économique de la zone euro ».
Ils excluent l’hypothèse d’une sortie de la Grèce, preuve que tout le monde y pensait. Sans trop y réfléchir, d’ailleurs : une éventuelle nouvelle drachme dévaluée de moitié aurait doublé l’endettement grec. « Tous les Etats membres sont responsables de la stabilité de la zone euro dans son ensemble », y lit-on. Tant mieux.
Archimède est mort pendant le siège de Syracuse. Son principe ne prévoyait pas la mécanique des changes flottants, ni les flatulences internes de la monnaie unique.
Quant à ses fameux miroirs, une expérience du MIT tendrait à montrer que la légende contient une part de vérité. L’équipe universitaire réussit à mettre le feu à une reconstitution de galère romaine.
Mettre le feu ? Alors que Moody’s dément les rumeurs de dégradation de la note italienne, Milan chute de près de 5% pour le deuxième jour consécutif. La BCE maintient son taux directeur à 1%. Les investisseurs italiens et l’internationale des spéculateurs savent pourquoi. La dette italienne, de source OCDE, représenterait 23% du total de la dette souveraine de la zone Euro.
Le plan drastique imposé à l’Argentine avait abouti à un gigantesque abandon de créances.