Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

La mobilité intelligente : les citoyens sont en avance

Par Javier Creus

Illustration @JaviCreus. DR.

Le développement des villes intelligentes dépend d’investissements significatifs afin de déployer des réseaux de nouveaux dispositifs et senseurs, de générer des informations et de concevoir des usages et des services qui justifient leur mise en place. À notre époque, c’est un processus difficile et lent.

Dans ce sens, la mobilité est différente : d’une part, le bénéfice personnel et collectif en termes d’économies est évident pour chacun. D’autre part, nous-mêmes, c’est-à-dire tous les citoyens, sommes les acteurs principaux du système de mobilité, et nous sommes localisés et connectés. Nous avons des senseurs sur nous, nous savons où nous sommes, où nous voulons aller, et même comment.

Vous vous déplacez en marchant ou en courant ; en voiture, en autobus, en métro ou en taxi, à vélo ou à moto ; vous disposez déjà sur certains de vos écrans de solutions pour tirer profit de votre véhicule ou de votre place de parking si vous en avez une, pour disposer d’une voiture ou d’un parking si nécessaire, pour rentabiliser vos déplacements habituels, pour éviter les incidents et gagner du temps et de l’argent dans vos trajets. Les mécanismes de l’économie collaborative associés à l’information ouverte des opérateurs de transport ont beaucoup à apporter dans la gestion du transport urbain, et ils le font. À pas de géant.

Commençons par le plus grand obstacle à la circulation urbaine : notre chère voiture particulière. Si vous en avez une et que vous ne l’utilisez pas, vous aurez les mêmes frais d’assurance, de révision et de dépréciation. Si vous l’utilisez de façon sporadique, vous pensez certainement que cela ne vaut pas la peine d’acheter et d’entretenir une voiture pour l’utiliser de temps en temps. Si vous en avez une, mais que vos habitudes sont irrégulières – vous êtes séparé et vous devez parfois transporter des enfants et des vélos, par exemple – votre voiture ne vous est pas toujours utile. Des plateformes de partage de véhicules permettent de résoudre ce casse-tête en mettant en relation des personnes qui souhaitent louer leur voiture et d’autres qui souhaitent en louer.

Même les entreprises adoptent cette formule : elles louent leur voiture particulière à leurs employés en fonction de l’usage qu’ils en font dans le cadre de leur travail. Pour chaque voiture partagée, dix voitures disparaissent de la voie publique. Un autre exemple, pour les vélos : sur Stpln.se, une entreprise de Malmö, en Suède, les autorités déposent les vélos détériorés abandonnés dans les rues, et les particuliers peuvent profiter des pièces détachées pour construire ou réparer leur propre vélo. Usage exclusif ou partagé ?

Vous préférez peut-être prendre le volant de votre propre voiture, mais vous voyagez seul et il vous reste des places libres. Vous pouvez publier des informations sur vos prochains voyages sur Blablacar.com, et offrir vos places disponibles à d’autres personnes qui souhaitent effectuer le même trajet, et qui préfèrent le confort du transport privé au même prix que le transport public. Il en est de même pour les déplacements en taxi : vous pouvez également partager le voyage avec des applications comme Joinup, spécialement utile pour les déplacements vers et depuis les aéroports. Transport particulier ou collectif ?

Lors de nos déplacements, nous pouvons utiliser le navigateur de la voiture, le portable ou la tablette, et recevoir par radio des informations officielles sur l’état de la circulation et des indications utiles pour nous guider. Mais nous pouvons également utiliser des applications telles que Waze, qui nous fournit des informations sur les accidents, les contrôles de police et les conditions de circulation, diffusées par d’autres conducteurs en temps réel. Les usagers des trains de banlieue du gouvernement catalan ont découvert le site Rodalias.info avant le lancement du site officiel, et depuis lors, ils partagent via Twitter des informations sur les retards et les incidents, mais aussi sur les interventions musicales spontanées qui ont lieu dans des wagons, des commentaires sur des articles de journaux ou des interventions de radio, ou même des chansons qui rappellent les voyages scolaires : “Soy un rodalías, soy un rodalías todos los dias, viajar en tren me da alegrías” : « Je suis un train de banlieue, je suis un train quotidien, voyager en train ça m’plaît bien ». (#rodl1, 24 janvier 2013). Informations officielles ou officieuses ?

Il existe même des alternatives pour marcher plus intelligemment, en tirant profit de votre trajet ou en aidant les autres. Le site Etece.com, créé récemment, vous permet de fournir de menus services aux personnes qui en ont besoin, comme livrer des paquets, apporter des repas ou les courses, par exemples. D’autres sites tels que Goodgym.org, vous proposent de faire des bonnes actions (promener une personne en fauteuil roulant ou lui faire ses courses) tout en marchant. Les personnes qui se déplacent en fauteuil roulant ou qui ont des difficultés visuelles ont trouvé dans les applications un guide de la ville adapté à leurs besoins particuliers. Marcher pour marcher ?

À pied ou sur roues, sans autres infrastructures que la confiance mutuelle, les particuliers prennent les devants pour construire une mobilité urbaine plus intelligente, où ils profitent plus du parc de véhicules disponible, des trajets habituels et des informations diffusées par les personnes lors de leurs déplacements, tout en ouvrant la rue à des personnes aux capacités fonctionnelle particulières.

Le défi collectif que doivent relever nos institutions est comment mieux rentabiliser les infrastructures disponibles : les compléter par des senseurs, des dispositifs et des interfaces, si possible avec des logiciels libres ; mettre les informations qu’ils génèrent à la disposition de tous et dans des formats standard pour que n’importe quel individu ou programmateur puisse les traiter et les utiliser à des fins personnelles ; concevoir des protocoles permettant à certains agents qualifiés d’opérer directement sur celles-ci ; prioriser les usages dans lesquels les usagers ou l’initiative privée a détecté un besoin réel et l’a résolu grâce à la collaboration et au développement technologique.

Traduction de l'espagnol : Javier Creus.

La mobilité intelligente : les citoyens sont en avance

L'auteur

Créateur d’Ideas for Change, un think-tank stratégique pour des clients tels que : Telefónica, Fundeu, UOC, le gouvernement basque ou la ville de Barcelone. Javier Creus est considéré comme l’un des experts en stratégie et l’un des penseurs les plus innovants en matière d’économie collaborative, de modèles de négociation ouverts et de P2P, d’innovation citoyenne et de société en réseau. Il a été planificateur stratégique pour de nombreuses agences parmi les plus créatives d’Espagne, cofondateur de la pépinière d’entreprises Digital Mood et de l’espace multidisciplinaire @kubik, et professeur de marketing de services à l’Esade. Coauteur de « No somos hormigas » (« Nous ne sommes pas des fourmis »), il publie régulièrement sur Yorokubu. Membre actif de l’Open Knowledge Foundation, Ouishare, de l’Escuela de los Commons et de MLove.

Tag(s) : #Mobilité, #Territoires
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :